Nous passons le col de l'Ofen à 2 149m, ou Pass Dal Fuorn en romanche, et entamons la descente vers Müstair. Ici, toutes les indications sont écrites dans les quatre langues officielles du pays, à savoir français, allemand, italien et romanche. Nous sommes dans une des vallées des Grisons où cette dernière est la plus pratiquée. Cette vallée a été classifiée réserve biosphère par l'Unesco pour sa grande diversité de patimoine naturel et culturel. Les paysages sont magnifiques, faits de prairies verdoyantes, de forêts d'aroles surmontées de pics spectaculaires. ils évoquent pour nous l'ouest Canadien et les parcs de Banff et Jasper... Isa me rappelle l'originalité de ces pins typiques de la haute montagne que nous avons déjà rencontrés en Suisse au pied du Cervin et au Canada : la reproduction des arolles est assurée en partie par un oiseau, le casse-noix moucheté, qui enfouit les graines puis oublie une grande partie de ses réserves permettant ainsi la pousse de nouveaux arbres.
Nous nous arrêtons à Santa Maria, un village avant Müstair. Nous retrouvons l'architecture typique de la Basse Engadine que nous avions découverte à Scuol en 2010, melant jambages et linteaux biais et peintures ornementales.
Le moins que l'on puisse dire est que les camping-cars ne sont pas les bienvenus dans cette vallée. Nous passons la frontière à Taufers en espérant que le versant italien soit plus accueillant.
Les premieres interdictions apparaissent, nous devinons déjà que trouver un bivouac ne sera pas aisé ce soir.
Nous sommes entrés dans la Province autonome de Bolzano, encore appelée Sud-Tyrol ou Haut-Adige. Cette région très disputée est redevenue italienne à la fin de la Première Guerre mondiale. La majorité des habitants sont germanophones, l'italien et le ladin, proche du romanche, sont les autres langues officiellement parlées. C'est la région la plus riche d'Italie.
Nous suivons la direction de Merano/Meran (le nom des villes est systématiquement écrit en italien et en allemand), puis Bolzano/Bozen, en suivant la rivière Adige. Cette large vallée est couverte d'arbres fruitiers, pommes et poires. Les flancs sont escarpés et nous apercevons sur chaque versant, de petits vignobles plantés à la limite des possibilités. Cela se confirme, il n'y aura pas de place pour nous par ici...
Nous passons ces deux villes, les spots indiqués par P4N sont, soit bondés, soit sans intérêt, nous continuons en direction du col du Brenner et de l'Autriche. Nous bifurquons ensuite dans le Val Gardena pour rejoindre Cortina d'Ampezzo. Il fait nuit maintenant, nous traversons la station Ortisei/St Ulrich, le stationnement des camping-cars est toujours aussi prohibé. Nous trouvons enfin à nous stationner à la sortie de Selva di Val Gardena, au lieu-dit Plan de Galba.
Nous avons parcouru 572km ce jour.
Nous reprenons la route et franchissons le col Sella del Culac à 2 018m, puis le passo di Gardena à 2 121m. Je m'arrête pour une pause photo sur le parking de ce dernier, une dame arrive immédiatement pour me faire payer le stationnement. Elle me laisse tout de même prendre ma photo et nous repartons.
Nous traversons la station de Corvara in Badia / Kurfar et prenons la route du Passo Valparola. Nous entrons dans le parc régional des Dolomites d'Ampezzo et la Province de Belluno.
Nous arrivons à Cortina d'Ampezzo. Le hasard me conduit directement sur le parking autorisé aux camping-cars, où une place nous y attend.
Nous déjeunons puis mettons à profit la fraîcheur de l'altitude pour nous reposer des kilomètres de la veille. En fin d'après-midi, nous partons visiter la ville et nous renseigner à l'office du tourisme sur les différentes randonnées à faire dans les Dolomites.
Nous avons parcouru 60km ce jour, 632km depuis notre départ.
Nous nous habillons rapidement et prenons la route du passo Tre Croci, point de départ de la randonnée. Nous quittons Cortina, la route s'élève rapidement avec des pentes à plus de 14%, soudain je réalise que nous avons oublié le seau que nous utilisons pour recueillir nos eaux usées... Nous arrivons au col, nous déjeunons en vitesse, préparons notre casse-croûte et partons. Il est presque 8h00.
Nous ne sommes pas seuls, mais les départs se font par petits groupes si bien que nous arrivons à préserver notre tranquilité. Le retour se faisant par le même chemin, il est à craindre que les condtions ne soient plus les mêmes cet après-midi...
Durant la première partie, nous marchons à l'ombre des mélèzes entre lesquels nous avons une vue extraordinaire sur la vallée d'Auronzo. Quelques kilomètres plus loin, c'est le lac de Misurina que nous pouvons apercevoir.
Hier, la dame du bureau du tourisme de Cortina a déconseillé à Isa cette randonnée, qu'elle décrivait comme difficile, avec des passages en via ferrata. Les informations que nous avons glânées sur internet sont toutes autres. Cela fait un peu plus d'une heure que nous marchons, nous arrivons aux fameuses échelles et il est maintenant temps de vérifier les dires de chacun...
Il est certain qu'il ne faut pas avoir trop le vertige, mais il s'agit en fait d'escaliers métalliques et d'un passage étroit où le sentier tourne à angle droit le long du rocher, au dessus du vide. La paroi est équipée d'un câble, il n'y a donc rien à craindre sauf à vouloir passer à plusieurs de front...
Deux heures exactement après notre départ, nous découvrons le lac di Sorapis. Il faut suivre le chemin et c'est seulement au tout dernier moment, au dernier pas, qu'apparaissent ses eaux turquoises et laiteuses. L'environnement est sauvage et parcourir le tour de celui-ci se mérite. Isa l'entreprend par le versant de la montagne Sorapis, le grand pic à 3 205m qui surplombe le lac, tandis que je pars sur le sentier de l'autre rive, à priori plus facile.
Nous nous retrouvons sur la prairie à l'autre bout du lac. Isa a mis plus de temps que moi et s'est faite quelques frayeurs avec une paroi escaladée sans équipement qu'elle me dit ne pas vouloir refaire...
Il est presque 11h00 lorsque nous décidons de redescendre. Les touristes commencent à arriver en nombre et il faut maintenant faire la queue aux passages délicats. C'est le seul point négatif de cette randonnée qui reste un véritable moment de bonheur.
Nous sommes de retour au passo Tre Croci à 13h00 et pique-niquons à l'ombre des mélèzes.
Nous redescendons ensuite à Cortina pour voir si notre seau est toujours à sa place ; celui-ci a disparu, pourtant nos voisins de la nuit sont toujours là, mais personne n'a rien vu.
Nous faisons le plein de gasoil et revenons vers le col. Nous nous installons au-dessus du départ des pistes de Rio Gere, sur l'une des plateformes le long d'une piste assez raide, plutôt réservées aux petits fourgons et aux vans, tandis que les gros CC restent sur le grand parking du bas.
Ce bivouac est de toute beauté. Nous installons table et chaises, tente de douche ainsi que la solette fraîchement acquise. Pour la première fois depuis au moins cinq ans, je place même les cales...
Isa est sous la douche lorsque nous avons la visite de deux carabinieri. Toute cette installation n'est pas à leur goût, il est autorisé de stationner, mais pas de camper. Ce n'est pas comme si nous ne le savions pas, mais il faut reconnaître que ce n'est pas de chance. C'est une mauvaise journée, nous ne recevons pas d'amende mais nous sommes maintenant fichés et nos passeports sont enregistrés...
Nous avons parcouru 20km ce jour, 662km depuis notre départ.
Nous commençons à marcher à 7h30. Nous passons devant le refuge Auronzo puis suivons un large chemin tracé dans les éboulis de la face sud des Tre Cime.
Nous passons une petite chapelle et apercevons déjà le refuge Lavaredo. Deux solutions s'offrent à nous, nous optons pour le sentier raide toujours à travers les éboulis.
Le petit col se situe à l'extrémité est des Tre Cime. Elles sont maintenant face à nous, dans l'ordre, Piccola (2 857m), Grande (2 999m) et Ovest (2 973m).
Depuis le départ nous suivons le sentier 101. Celui-ci se poursuit maintenant dans l'ombre du mont Paterno en direction du refuge Locatelli que nous avons déjà en point de mire.
Nous arrivons au refuge au prix d'un dernier effort pour gravir les hautes marches d'une succession d'escaliers aménagés dans la roche. Nous avons quitté la province de Belluno et sommes revenus dans celle de Bolzano/Bozen. Les inscriptions sur le refuge sont en allemand, le "refugio alle Tre Cime" est maintenant le "Drei Zinnen Hütte"...
Nous entamons le retour après une pause casse-croûte face aux pics et une large séquence photo de ce magnifique décor. Cette fois nous abandonnons le sentier 101 pour le 105 par le col Forcellina. La descente est abrupte et la remontée tout autant, mais nous sommes récompensés en découvrant les jolis lacs de la Grava Longa. Le soleil est déjà haut, nous n'aurons pas la chance d'admirer le reflet des sommets dans les lacs...
La boucle s'achève au milieu d'un champ de cairns, nous marchons depuis un peu plus de cinq heures. Cette randonnée est un enchantement, le fait d'être en haute saison touristique ne nous aura pas pénalisé. Les marcheurs suivent globalement le même sens et nous avons croisé que peu de personne.
Nous déjeunons face au Cadin di San Lucano, puis redescendons vers notre bivouac de la veille.
En cours de route, nous faisons une pause photo devant les lacs d'Antorno et de Misurina. Le premier est un véritable paysage de carte postale quant au second, entouré d'hôtels et de parkings, il ne nous laissera pas un souvenir impérissable.
Nous retrouvons notre petite plateforme en pleine nature, nous avons parcouru 32km ce jour, 684km depuis notre départ.